Synthèse d'article scientifique produite par la Fondation Descartes de :
Allcott, H., Gentzkow, M., & Yu, C. (2019). Trends in the diffusion of misinformation on social media. Research & Politics, 6(2), 2053168019848554.
Cet article de 2019 quantifie la présence des fake news sur les réseaux sociaux. Les fake news auraient tendance à diminuer sur Facebook depuis 2016 alors qu'elles auraient tendance à augmenter sur Twitter pour la même période. Globalement, Facebook reste un important réseau pour la diffusion des fake news, bien davantage que Twitter.
Facebook et Twitter, deux des principaux réseaux sociaux, ont développé des outils pour améliorer leurs algorithmes face à la montée des fake news (« misinformation ») depuis les élections présidentielles américaines de 2016.
Les dispositions prises par Facebook pour intégrer des outils de vérification des faits (fact-checking avec des labels pour avertir les internautes) ont été critiquées comme étant peu efficaces et lacunaires. De nombreux commentateurs estiment même que la vérification des faits est en soi trop peu efficace et que les fake news sont impossibles à endiguer.
Le présent article cherche à documenter factuellement la présence des fake news sur Facebook et Twitter depuis 2015 (et jusqu’à juillet 2018).
A partir de 5 listes différentes (3 provenant de sites de vérification de faits, 2 d’études scientifiques sur les fake news), les auteurs regroupent 569 sites internet diffuseurs de fake news (après exclusion de certains par manque de données). Cette liste n’étant pas exhaustive, le nombre total de fake news en ligne et sur les réseaux sociaux est vraisemblablement sous-évalué dans cette étude.
9 540 adresses web (URL) sont finalement extraites : chaque URL renvoie à une fake news sur un des sites de la liste. Chaque URL a été vérifiée manuellement pour s’assurer qu’elle contenait bien une fake news.
Précision importante, pour mesurer la pénétration des fake news sur Twitter et Facebook, les auteurs utilisent l’outil Buzzsumo qui ne permet pas de comptabiliser les nombres de vues (comme sur Youtube, par exemple). Les auteurs définissent la pénétration des fake news sur Facebook en calculant un score d’engagement pour chaque site de fake news basé sur les réactions (like, etc.), partages et commentaires : plus le nombre de réactions est important et plus le score d’engagement sera haut. Sur Twitter, le score est basé sur le nombre de partages. Encore une fois, les résultats vont donc vraisemblablement sous-évaluer l’exposition réelle aux fake news.
A l’aide de l’outil de mesure du trafic en ligne Alexa, les auteurs constituent une liste de 170 articles répartis en 3 catégories (sites d’informations très visités ; sites d’informations faiblement visités ; site d’informations culturelles et économiques très visités). Cette liste permet d’établir une comparaison entre la popularité des fake news et les autres types d’information.
Sur Facebook, le score d’engagement total des fake news est au plus haut fin 2016 - début 2017. Il décroit ensuite fortement : on passe d’environ 160 millions de score d’engagement au pic fin 2016 à environ 60 millions en juillet 2018 (une baisse de plus de 60%). Par comparaison, les sites principaux d’information ont récolté un score d’engagement de 200 millions (3 fois plus) en juillet 2018.
Sur Twitter, le score de partage augmente fortement entre 2015 et juillet 2018. On passe de moins de 2 millions de partage à environ 5 millions de partage. Par comparaison, les sites principaux d’information ont récolté environ 25 millions de partage (5 fois plus) sur Twitter en juillet 2018.
Pour faciliter la compréhension des résultats, les graphiques sont disponibles via l’article qui est en accès ouvert.
Les deux principaux messages à retenir de cette étude sont les suivants :
Il est donc possible, mais davantage d’études devraient être faites sur le sujet, que la politique anti-fake news de Facebook ait conduit à une diminution de leur visibilité sur son réseau. Pour Twitter, il est difficile d’expliquer la tendance à la hausse des fake news sur ce site. Les auteurs ne proposent pas d’hypothèse et avertissent que les comparaisons doivent être conduites avec précaution car les scores d’engagement n’ont pas été construits de la même façon sur ces deux réseaux sociaux.